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SQ2 Le cercle de famille : récits autobiographiques autour de l’enfance Présentation de la séquence, déroulé provisoire dates prévisionnelles
Travail final (à envisager ou discuter) Vous sélectionnez un des textes du corpus et de le défendez dans le cadre de ce qui serait un "appel d'offre éditorial". Vous devrez alors, en plus de fournir une lecture personnelle du texte, montrer ses spécificités et ses beautés particulières, sélectionner les plus beaux passages... De plus, vous devrez, toujours dans l'esprit d'une édition à venir, fournir des éléments iconographiques en rapport avec le texte. Votre présentation du texte s’accompagnera d’une notice par laquelle l’auteur se présente en une dizaine de lignes, à la première personne du singulier. Des pistes de travaux créatifs à partir de chacun des extraits proposés. (à réaliser en groupe) A partir du texte de Annie Ernaux : Quelques moments dans la vie de la narratrice. En prenant appui sur le texte, construisez une scène de théâtre en plusieurs temps dans laquelle vous montrez ces deux êtres face à face. Vous pouvez reprendre certains propos du père sous forme de dialogue ou mettre en relief ce qu’il ressent par la lecture en voix off. Vous jouerez cette scène qui peut durer 4 à 5 minutes. A partir du texte de Stendhal. Une galerie de portraits Le narrateur brosse un tableau de sa famille. Mettez-le en scène dans la maison familiale qu’il retrouve. Il présente des toiles qui représentent les siens (à vous de les chercher sur un site comme http://www.lectura.fr/dossiers/stendhal/index.php ou à trouver). Il présente cette galerie de portraits au public. Vous jouerez cette scène qui doit reprendre ce que le texte dit. Une part d’invention est possible, mais elle reste conforme au texte de départ. Autre possibilité : entretien entre Stendhal et un journaliste A partir du texte de Michel Leiris Chacun a ses raisons Le narrateur raconte un souvenir particulièrement traumatisant pour lui. Ecrivez les monologues que vous pourriez mettre dans la bouche du père, de la mère du médecin et du chirurgien. Chacun s’exprime à son tour dans un décor qui pourra tenir à une simple photo projetée sur le mur de la salle polyvalente (ou à quelques éléments de décor) pour donner ses raisons. Elles ne sont pas les mêmes mais elles correspondent à ce qu’on lit dans le récit de M. Leiris. A partir du texte de Modiano Un album photo Le narrateur évoque sa mère et l’année 62 (le début des années soixante). Il évoque des personnes et des lieux réels. Reconstituez un album de photos en noir et blanc qu’il feuilletterait devant nous : dans le diaporama que vous fabriquerez, on retrouvera un certain nombre de photos, prises à Paris. Le narrateur en fera le commentaire. Prenez appui sur le texte. A partir du poème de Hugo Feuilletez le recueil des Contemplations et choisissez 5 poèmes évoquant Léopoldine. Recopiez-les dans un fichier et choisissez des illustrations pour mettre en regard images et textes de Hugo. Apprenez seul, à deux ou à trois le poème proposé ici pour le dire devant la classe. SQ3 Le cercle de famille : récits autobiographiques autour de l’enfance SQ 3: le cercle de famille Un jour, à Genève, lui ayant donné rendez-vous à cinq heures dans le square de l’Université, je n’arrivai, retenu par une blondeur, qu’à huit heures du soir. Elle ne me vit pas venir. Je la considérai, la honte au cœur, qui m’attendait patiemment, assise sur un banc, toute seule, dans le jour tombé et l’air refroidi, avec son pauvre manteau trop étroit et son chapeau affaissé sur le côté. Elle attendait là, depuis des heures, docilement, paisiblement, un peu somnolente, plus vieille d’être seule, résignée, habituée à la solitude, habituée à mes retards, sans révolte en son humble attente, servante, pauvre sainte poire. Attendre son fils pendant trois heures, quoi de plus naturel et n’avait-il pas tous les droits ? Je le hais ce fils. Elle m’aperçut enfin et elle se remit à vivre, toute de moi dépendante. Je revois son sursaut de vitalité revenue, je la revois passant de sa somnolence d’esclave ou de chien fidèle à un extrême intérêt à vivre. Elle ajusta son chapeau et ses traits, car elle tenait à me faire honneur. Et ensuite, Maman vieillissante, elle eut ses deux gestes à elle, d’où lui étaient-ils venus et en quelle enfance avaient-ils été puisés ? Je les revois si bien ces deux gestes gauches et poétiques quand, de loin, elle me voyait arriver. Le terrible des morts, c’est leurs gestes de vie dans notre mémoire. Car alors, ils vivent atrocement et nous n’y comprenons plus rien. Albert Cohen Le livre de ma mère 1954 (Folio) SQ 3: le cercle de famille Séance 2 : les caractéristiques d’un texte autobiographique Un jour, à Genève, lui ayant donné rendez-vous à cinq heures dans le square de l’Université, je n’arrivai, retenu par une blondeur, qu’à huit heures du soir. Elle ne me vit pas venir. Je la considérai, la honte au cœur, qui m’attendait patiemment, assise sur un banc, toute seule, dans le jour tombé et l’air refroidi, avec son pauvre manteau trop étroit et son chapeau affaissé sur le côté. Elle attendait là, depuis des heures, docilement, paisiblement, un peu somnolente, plus vieille d’être seule, résignée, habituée à la solitude, habituée à mes retards, sans révolte en son humble attente, servante, pauvre sainte poire. Attendre son fils pendant trois heures, quoi de plus naturel et n’avait-il pas tous les droits ? Je le hais ce fils. Elle m’aperçut enfin et elle se remit à vivre, toute de moi dépendante. Je revois son sursaut de vitalité revenue, je la revois passant de sa somnolence d’esclave ou de chien fidèle à un extrême intérêt à vivre. Elle ajusta son chapeau et ses traits, car elle tenait à me faire honneur. Et ensuite, Maman vieillissante, elle eut ses deux gestes à elle, d’où lui étaient-ils venus et en quelle enfance avaient-ils été puisés ? Je les revois si bien ces deux gestes gauches et poétiques quand, de loin, elle me voyait arriver. Le terrible des morts, c’est leurs gestes de vie dans notre mémoire. Car alors, ils vivent atrocement et nous n’y comprenons plus rien. Albert Cohen Le livre de ma mère 1954 (Folio) Lisez ce texte à voix haute en étant attentif à la ponctuation, au jeu des répétitions, au choix des adjectifs et adverbes. En quoi ce texte vous touche-t-il ? Le thème du texte
Le moment du récit, le moment de l’énonciation
Le portrait de la mère
Un autoportrait du narrateur
Conclusion En quoi ce récit autobiographique ressemble-t-il à une confession ? Une photo de moi, prise seule, au-dehors, avec à ma droite la rangée de remises1, les anciennes accolées aux neuves. Sans doute n'ai-je pas encore de notions esthétiques. Je sais toutefois paraître à mon avantage : tournée de trois-quarts pour estomper les hanches moulées dans une jupe étroite, faire ressortir la poitrine, une mèche de cheveux balayant le front. Je souris pour me faire l'air doux. J'ai seize ans. Dans le bas, l'ombre portée du buste de mon père qui a pris la photo. [...] Il n'osait plus me raconter des histoires de son enfance. Je ne lui parlais plus de mes études. Sauf le latin, parce qu'il servait à la messe2, elles lui étaient incompréhensibles et il refusait de faire mine de s'y intéresser, à la différence de ma mère. Il se fâchait quand je me plaignais du travail ou critiquais les cours. Le mot « prof» lui déplaisait, ou « dirlo », même « bouquin ». Et toujours la peur OU PEUT-ÊTRE LE DÉSIR que je n'y arrive pas. Il s'énervait de me voir à longueur de journée dans les livres, mettant sur leur compte mon visage fermé et ma mauvaise humeur. La lumière sous la porte de ma chambre le soir lui faisait dire que je m'usais la santé. Les études, une souffrance obligée pour obtenir une bonne situation et ne pas prendre3 un ouvrier. Mais que j'aime me casser la tête lui paraissait suspect. Une absence de vie à la fleur de l'âge. Il avait parfois l'air de penser que j'étais malheureuse. Devant la famille, les clients, de la gêne, presque de la honte que je ne gagne pas encore ma vie à dix-sept ans, autour de nous toutes les filles de cet âge allaient au bureau, à l'usine ou servaient derrière le comptoir de leurs parents. Il craignait qu'on ne me prenne pour une paresseuse et lui pour un crâneur. Comme une excuse : « On ne l'a jamais poussée, elle avait ça dans elle. » Il disait que j'apprenais bien, jamais que je travaillais bien. Travailler, c'est seulement travailler de ses mains. Les études n'avaient pas pour lui de rapport avec la vie ordinaire. Il lavait la salade dans une seule eau, aussi restait-il souvent des limaces. II a été scandalisé quand, forte des principes de désinfection reçus en troisième, j'ai proposé qu'on la lave dans plusieurs eaux. Une autre fois, sa stupéfaction a été sans bornes, de me voir parler anglais avec un auto-stoppeur qu'un client avait pris dans son camion. Que j'aie appris une langue étrangère en classe, sans aller dans le pays, le laissait incrédule. [...] La dispute éclatait à table pour un rien. Je croyais toujours avoir raison parce qu'il ne savait pas discuter. Je lui faisais des remarques sur sa façon de manger ou de parler. J'aurais eu honte de lui reprocher de ne pas pouvoir m'envoyer en vacances, j'étais sûre qu'il était légitime de vouloir le faire changer de manières. Il aurait peut-être préféré avoir une autre fille. Un jour : « Les livres, la musique, c'est bon pour toi. Moi je n'en ai pas besoin pour vivre. » Le reste du temps, il vivait patiemment. Quand je revenais de classe, il était assis dans la cuisine, tout près de la porte donnant sur le café, à lire Paris-Normandie, le dos voûté, les bras allongés de chaque côté du journal étalé sur la table. Il levait la tête : « Tiens, voilà la fille. »
Heureux de me nourrir, au moins. On se disait les mêmes choses qu'autrefois, quand j'étais petite, rien d'autre. Annie Ernaux, La Place © Éditions Gallimard, 1983 1 Hangar 2 Il servait comme enfant de chœur 3 Prendre pour époux. Sq 3 Le cercle de famille Jamais peut-être le hasard n'a rassemblé deux êtres plus foncièrement antipathiques que mon père et moi. De là l'absence de tout plaisir dans mon enfance, de 1790 à 1799. Cet âge, que la voix de tous dit être celui des vrais plaisirs de la vie, grâce à mon père n'a été pour moi qu'une suite de douleurs amères et de dégoûts. Deux diables étaient déchaînés contre ma pauvre enfance, ma tante Séraphie et mon père qui dès 1791 devint son esclave. Le lecteur peut se rassurer sur le récit de mes malheurs, d'abord il peut sauter quelques pages, parti que je le supplie de prendre, car j'écris à l'aveugle peut-être des choses fort ennuyeuses même pour 1835, que sera-ce en 1880? En second lieu je n'ai presque aucun souvenir de la triste époque 1790-1795 pendant laquelle j'ai été un pauvre petit bambin persécuté, toujours grondé à tout propos, et protégé seulement par un sage à la Fontenelle1 qui ne voulait pas livrer bataille pour moi, et d'autant qu'en cas de bataille son autorité supérieure à tout lui commandait d'élever davantage la voix, or c'est ce qu'il avait le plus en horreur ; et ma tante Séraphie, qui je ne sais pourquoi m'avait pris en guignon, le savait bien aussi. Quinze ou vingt jours après la mort de ma mère, mon père et moi nous retournâmes coucher dans la triste maison, moi dans un petit lit vernissé fait en cage, placé dans l'alcôve de mon père. Il renvoya ses domestiques et mangea chez mon grand-père qui jamais ne voulut entendre parler de pension. Je crois que c'est par intérêt pour moi que mon grand-père se donna ainsi la société habituelle d'un homme qui lui était antipathique. Ils n'étaient réunis que par le sentiment d'une profonde douleur. À l'occasion de la mort de ma mère ma famille rompit toutes ses relations de société, et, pour comble d'ennui pour moi, elle a depuis constamment vécu isolée. M. Joubert, morne pédant' montagnard (on appelle cela à Grenoble bet, ce qui veut dire un homme grossier né dans les montagnes de Gap), M. Joubert qui me montrait le latin, Dieu sait avec quelle sottise, en me faisant réciter les règles du rudiment', chose qui rebutait mon intelligence et l'on m'en accordait beaucoup, mourut. J'allais prendre ses leçons sur la petite place Notre-Dame ; je puis dire n'y avoir jamais passé sans me rappeler ma mère et la parfaite gaieté de la vie que j'avais menée de son temps. Actuellement, même mon bon grand-père en m'embrassant me causait du dégoût. Stendhal, Vie de Henry Brulard, écrit en 1835 publication posthume 1890. Notes de vocabulaire Michel Leiris (1901-1990) Cet ethnologue et écrivain français a rédigé son autobiographie, L'Âge d'homme, après une psychanalyse. L’âge d'homme Agé de cinq ou six ans, je fus victime d'une agression. Je veux dire que je subis dans la gorge une opération qui consista à m'enlever des végétations ; l'intervention eut lieu d'une manière très brutale, sans que je fusse anesthésié. Mes parents avaient d'abord commis la faute de m'emmener chez le chirurgien sans me dire où ils me conduisaient. Si mes souvenirs sont justes, je m'imaginais que nous allions au cirque; j'étais donc très loin de prévoir le tour sinistre que me réservaient le vieux médecin de la famille, qui assistait le chirurgien, et ce dernier lui-même. Cela se déroula, point pour point, ainsi qu'un coup monté et j'eus le sentiment qu'on m'avait attiré dans un abominable guet-apens. Voici comment les choses se passèrent : laissant mes parents dans le salon d'attente, le vieux médecin m'amena jusqu'au chirurgien, qui se tenait dans une autre pièce en grande barbe noire et blanche (telle est, du moins, l'image d'ogre que j'en ai gardée) ; j'aperçus des instruments tranchants et, sans doute, eus-je l'air effrayé car, me prenant sur ses genoux, le vieux médecin dit pour me rassurer : «Viens, mon petit coco. On va jouer à faire la cuisine. » À partir de ce moment je ne me souviens plus de rien, sinon de l'attaque soudaine du chirurgien qui plongea un outil dans ma gorge, de la douleur que je ressentis et du cri de bête qu'on éventre que je poussai. Ma mère, qui m'entendit d'à côté, fut effarée. Dans le fiacre qui nous ramena je ne dis pas un mot; le choc avait été si violent que pendant vingt-quatre heures il fut impossible de m'arracher une seule parole; ma mère, complètement désorientée, se demandait si je n'étais pas devenu muet. Tout ce que je me rappelle de la période qui suivit immédiatement l'opération, c'est le retour en fiacre, les vaines tentatives de mes parents pour me faire parler puis, à la maison : ma mère me tenant dans ses bras devant la cheminée du salon, les sorbets qu'on me faisait avaler, le sang qu'à diverses reprises je dégurgitai et qui se confondait pour moi avec la couleur fraise des sorbets. Ce souvenir est, je crois, le plus pénible de mes souvenirs d'enfance. Non seulement je ne comprenais pas que l'on m'eût fait si mal, mais j'avais la notion d'une duperie, d'un piège, d'une perfidie atroce de la part des adultes, qui ne m'avaient amadoué que pour se livrer sur ma personne à la plus sauvage agression. Michel Leiris, L'Âge d'homme, © Éditions Gallimard, 1939. Ma mère n'a pas d'argent et aucun engagement théâtral en cet octobre 1962. Et mon père menace de ne plus subvenir à mon entretien si je ne réintègre pas le dortoir de l'internat. En y réfléchissant aujourd'hui, il me semble que je ne lui coûtais pas cher : le prix modeste de l'internat. Mais je me souviens de l'avoir vu à la fin des années cinquante, complètement « raide », au point de m'emprunter les mille francs anciens que m'envoyait parfois mon grand-père de Belgique sur sa retraite d'ouvrier. Je me sentais plus proche de lui que de mes parents. Je continue à faire la « grève » de l'internat. Un après-midi, nous n'avons plus un sou, ma mère et moi. Nous nous promenons dans les jardins des Tuileries. En dernier recours, elle décide de demander une aide à son amie Suzanne Flon. Nous allons à pied chez Suzanne Flon, sans même la menue monnaie pour deux tickets de métro. Elle nous reçoit dans son appartement de l'avenue George-V aux terrasses superposées. On se croirait à bord d'un navire. Nous restons dîner chez elle. Ma mère, sur un ton de mélodrame, lui expose nos « malheurs », bien campée sur ses jambes, le geste théâtral et péremptoire. Suzanne Flon écoute avec bienveillance, navrée de cette situation. Elle se propose d'écrire une lettre à mon père. Elle donne de l'argent à ma mère. Les mois suivants, mon père doit se résoudre à ce que je quitte pour toujours les dortoirs que je fréquentais depuis l'âge de onze ans. Il me fixe rendez-vous dans des cafés. Et il ressasse ses griefs contre ma mère et contre moi. Je ne parviens pas à établir entre nous une intimité. Je suis obligé de lui mendier, chaque fois, un billet de cinquante francs qu'il finit par me donner de très mauvaise grâce et que je rapporte à ma mère. Certains jours, je ne rapporte rien, ce qui provoque chez elle des accès de colère. Très vite — vers dix-huit ans et les années suivantes —, je m'efforcerai de lui trouver par mes propres moyens ces malheureux billets de cinquante francs à l'effigie de Jean Racine, mais sans réussir à désarmer l'agressivité et le manque de bienveillance qu'elle m'aura toujours témoignés. Jamais je n'ai pu me confier à elle ni lui demander une aide quelconque. Parfois, comme un chien sans pedigree et qui a été un peu trop livré à lui-même, j'éprouve la tentation puérile d'écrire noir sur blanc et en détail ce qu'elle m'a fait subir, à cause de sa dureté et de son inconséquence. Je me tais. Et je lui pardonne. Tout cela est désormais si lointain... Je me souviens d'avoir recopié, au collège, la phrase de Léon Bloy : « L'homme a des endroits de son pauvre cœur qui n'existent pas encore et où la douleur entre afin qu'ils soient. » Mais là, c'était une douleur pour rien, de celles dont on ne peut même pas faire un poème. La dèche aurait dû nous rapprocher. Une année — 1963 — il faut « raccorder » le gaz dans l'appartement. Des travaux sont nécessaires. Ma mère n'a pas d'argent pour les payer. Moi non plus. Nous faisons la cuisine sur un réchaud à alcool. Nous n'allumons jamais le chauffage, l'hiver. Ce manque d'argent nous poursuivra longtemps. Un après-midi de janvier 1970, nous sommes tellement aux abois qu'elle me traîne au mont-de-piété de la rue Pierre-Charron où je dépose un stylo « en or avec plume de diamant » qui m'a été remis par Maurice Chevalier à l'occasion d'un prix littéraire. Ils ne m'en donnent que deux cents francs que ma mère empoche, l'œil dur. Patrick Modiano Un pedigree 2005 p 86-88 Elle avait pris ce pli... 1 Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin De venir dans ma chambre un peu chaque matin ; Je l'attendais ainsi qu'un rayon qu'on espère ; Elle entrait et disait : Bonjour mon petit père ; 5 Prenait ma plume, ouvrait mes livres, s'asseyait Sur mon lit, dérangeait mes papiers, et riait. Puis soudain s'en allait comme un oiseau qui passe Alors, je reprenais, la tête un peu moins lasse, Mon oeuvre interrompue, et, tout en écrivant, 10 Parmi mes manuscrits je rencontrais souvent Quelque arabesque folle et qu'elle avait tracée, Et mainte page blanche entre ses mains froissée Où je ne sais comment, venaient mes plus doux vers, 15 Et c'était un esprit avant d'être une femme. Son regard reflétait la clarté de son âme. Elle me consultait sur tout à tous moments. Oh ! que de soirs d'hiver radieux et charmants, Passés à raisonner langue, histoire et grammaire, 20 Mes quatre enfants groupés sur mes genoux, leur mère Tout près, quelques amis causant au coin du feu ! J'appelais cette vie être content de peu ! Et dire qu'elle est morte ! Hélas que Dieu m'assiste ! Je n'étais jamais gai quand je la sentais triste ; 25 J'étais morne au milieu du bal le plus joyeux Si j'avais, en partant, vu quelque ombre en ses yeux. Victor Hugo Les contemplations. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Elle avait pris ce pli... 1 Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin De venir dans ma chambre un peu chaque matin ; Je l'attendais ainsi qu'un rayon qu'on espère ; Elle entrait et disait : Bonjour mon petit père ; 5 Prenait ma plume, ouvrait mes livres, s'asseyait Sur mon lit, dérangeait mes papiers, et riait. Puis soudain s'en allait comme un oiseau qui passe Alors, je reprenais, la tête un peu moins lasse, Mon oeuvre interrompue, et, tout en écrivant, 10 Parmi mes manuscrits je rencontrais souvent Quelque arabesque folle et qu'elle avait tracée, Et mainte page blanche entre ses mains froissée Où je ne sais comment, venaient mes plus doux vers, 15 Et c'était un esprit avant d'être une femme. Son regard reflétait la clarté de son âme. Elle me consultait sur tout à tous moments. Oh ! que de soirs d'hiver radieux et charmants, Passés à raisonner langue, histoire et grammaire, 20 Mes quatre enfants groupés sur mes genoux, leur mère Tout près, quelques amis causant au coin du feu ! J'appelais cette vie être content de peu ! Et dire qu'elle est morte ! Hélas que Dieu m'assiste ! Je n'étais jamais gai quand je la sentais triste ; 25 J'étais morne au milieu du bal le plus joyeux Si j'avais, en partant, vu quelque ombre en ses yeux. Victor Hugo Les contemplations. 1 Allusion à son grand-père Henri Gagnon, père de sa mère. Fontenelle était un écrivain et philosophe du XVIIIème siècle. |
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